05/06/2006
« Kokoro i ki »….. Construction par l’exemple.
Dans une précédente note j’annonçais mon désir d’évoquer ici la notion de « Kokoro »
Nombreux sont ceux qui m’ont demandé de leurs expliquer le sens du Kokoro dans sa conception japonaise. Parfois même, certains ont cherché à me faire traduire ce concept dans des langues où il n’existe pas en tant que tel. Une traduction mot à mot, si elle existait, serait rassurante à bien des égards surtout pour ceux qui pensent pouvoir progresser sans Shishô.
Mais la recherche du Kokoro mérite qu’on y consacre du temps et de l’énergie. Je pense profondément que, à l’instar des chevaliers qui recherchait le Graal, la recherche est en elle-même une composante du Kokoro car s’il est difficile de trouver le sens du Kokoro il est tout aussi difficile de remplir son Kokoro de sens.
IKEDA Shigéo Sensei, mon Shishô, a essayé durant toutes ces années passées ensemble de me faire comprendre le contenu de ce mot en ajoutant chaque fois qu’il lui était possible un nouvel éclairage à ce concept.Sans que je m’en rende compte, il faisait entrer en moi ou sortir de moi une partie des composantes qui me permettraient un jour de poursuivre la route dans la recherche du Kokoro en me nourrissant des expériences et des rencontres futures.
Je ne sais toujours pas expliquer simplement ce qu’est le Kokoro mais je sais identifier immédiatement les comportements qui en font parties ou les personnes qui les véhiculent.Le Kokoro est l’expression d’une philosophie de l’action et surtout pas d’une attitude à connotation cosmique qui se complairait dans la recherche de mots pour en expliquer d’autres et ainsi de suite.Le Kokoro c’est l’enveloppe qui contient la mise en œuvre au quotidien des valeurs du bushido que j’ai faites miennes.
Makoto Honnêteté
Meiyo Honneur
Chugi Loyauté
Yu Courage
Jin Bienveillance et Compassion
Gi Droiture dans la Conduite
Rei Respect et Politesse
Tchi Intelligence et Intuition
Shin Croyance en la nature humaine
Les années passent, et pas un jour sans penser au moyen de remplir mon Kokoro par de nouvelles sensations de bien-être grâce aux autres, grâce à moi, grâce à la vie.Le Kokoro n’existe que dans la durée.
Il se remplit avec ce qui vous est donné et avec ce que vous donnez.
En en faisant un élément essentiel des prises de décisions qui émaillent nos vies, nous donnons un sens aux valeurs que nous défendons.
L’erreur serait de concentrer son énergie à vouloir remplir son Kokoro uniquement des quelques grandes émotions qui jalonnent notre existence. Les éléments qui constituent le Kokoro n’ont pas de degrés d’importance, car tous contribuent à notre épanouissement même les petites choses de la vie de tous les jours.
Et quel bonheur si en plus de ces moments de bien-être, on se sent transporté exceptionnellement par des comportements dont l’exemplarité et la teneur en émotion nous font toucher du doigt le cœur du Kokoro. Quelles leçons de vie que ces moments là… Comme on voudrait être toujours à leur initiative… Cela vient nécessairement car le travail de chaque jour porte ses fruits, et un jour alors que tout nous semble ressembler à un autre jour, des êtres autour de nous seront à leurs tours touchés et bouleversés par une action simple que nous feront pour eux naturellement sans qu’il soit besoin de lui trouver une justification sociale quelconque.
Peut être n’identifieront ils pas forcément cela comme le Kokoro. Mais quelle importance, le nom qu’on lui donne ?
Pour faire comprendre à mon tour ce qui me fait progresser dans ma recherche du Kokoro, je voudrais donner trois exemples qui bien sur ont un lien avec mon Shishô IKEDA Shigéo, mais qui se sont déroulés après sa mort et qui représentent pour moi le Kokoro i ki.
1. Merci à mon Kohai
Depuis que notre Shishô est mort il y a bientôt cinq années, les liens que j’entretenais avec mon Kohai se sont resserrés, et notre relation, mélange de fraternité et de respect mutuel me remplissent de joie et de fierté.
En novembre dernier, j’ai donc décidé de me rendre au Japon trois jours, non pas pour m’entraîner mais pour être prêt de lui pour un des événements majeurs de sa vie, afin de lui transmettre le message de l’importance que notre relation avait pour moi. Quant au soir du dernier jour nous nous sommes quitté j’ai senti qu’il avait compris ce que j’étais venu faire à Tokyo. Nous nous sommes chaleureusement dit au revoir.
Mais le lendemain matin quand je suis descendu à 6h 30mn dans le hall de l’hôtel, il était là alors que je ne lui avais pas dit à quelle heure je partais et qu’il habite à 45mn.
Il m’a dit qu’il avait pensé que je n’aurais pas le temps de petit déjeuner, et que donc il m’avait apporté un bento (gamelle japonaise) et du thé.
1. Merci à Madame IKEDA et toute sa familleAu mois de janvier , comme à tous mes voyages j’ai pris contact avec Mme IKEDA, la femme, de feu mon Shishô IKEDA Shigéo, pour avoir le plaisir de la rencontrer, elle qui a tant fait pour moi.
Elle a rendu possible la relation Shishô–Deshi entre moi et son mari. Et encore maintenant, le regard qu’elle porte sur moi me motive dans cette recherche qui est la mienne afin de lui faire honneur autant qu’à la mémoire de son époux.
Et quand j’ai été lui rendre visite en janvier, elle m’attendait pour me donner le « bun kotsu » d’IKEDA Shigéo Sensei, c'est-à-dire une partie de ses ossements.
Quel vertige ce moment là…Quel message...Quelle responsabilité…
1. Merci aux amis proches de mon Shishô.Durant des années, j’ai vécu dans « l’ombre bienveillante de mon Shishô » en faisant très attention à poser mes pieds dans les mêmes empreintes de pas que lui. Grâce à cela, j’ai beaucoup appris et passé de merveilleuses années qui semblaient ne jamais avoir de fin.
Ses qualités d’homme exceptionnel et désintéressé ne laissaient pas indifférentes et nombreux sont les hommes et femmes de qualité qui ont vu en lui un ami dévoué et sincère.
Quant à moi j’étais là, souvent. Et même si je m’attachais à rester en retrait, conformément à mon statut de Deshi, je participais naturellement à beaucoup d’évènements en compagnie d’IKEDA Sensei et ses amis.
Quand il est décédé le 24 juillet 2001, nous avons tous pleuré.
L’homme étant exceptionnel, ses amis l’étaient aussi…Quelques temps après, le Shinobukai était né. Une association ou régulièrement tous ses amis se retrouvent pour évoquer et honorer sa mémoire.
Le 16 avril 2006, le Shinobukai s’était déplacé à Kyoto, ville de naissance d’IKEDA Shigéo. Dans la matinée, tous se sont rendus sur sa tombe, sans motif particulier hormis celui de le saluer…
12:05 Publié dans LE BUDO... | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.